Les retraites des fonctionnaires à la dérive.

En 2000, l'Etat a versé 207 milliards de retraites à ses anciens personnels. Le rapport sur les rémunérations annexé au projet de loi de finances pour 2001 montre que les cotisations des fonctionnaires ont été largement insuffisantes. Elles n'ont couvert que 14,2% des pensions distribuées à leurs aînés, le reste – c'est-à-dire 85,8% a été financé par les contribuables. 

Par comparaison, les agents des collectivités locales ont financé 23,8% de leurs retraites, et les salariés du régime "général" – doux euphémisme puisque ce régime n'a de général quel le nom – ont financé 42,7% des sommes allouées aux retraités du privé (le reste a été financé par leurs employeurs). Les actifs du privé ont donc cotisé deux fois:

  1. leurs charges sociales ont servi à financer les retraites de leurs aînés, selon la logique de la répartition, initiée par le gouvernement de Vichy et généralisée à la Libération.

  2. leurs impôts ont servi à financer les retraites de la fonction publique, conformément à la loi de budgétisation votée en 1853.

Si aujourd'hui cela est encore possible tant que le coût des retraites du public augmente modérément (+4,6 milliards de francs en 2001), ce ne sera pas le cas dans la décennie qui vient. Près de 40% des fonctionnaires en activité vont partir à la retraite, ce qui suscitera un accroissement brutal des pensions à distribuer. Faute de pouvoir reporter ces coûts sur des contribuables déjà lourdement taxés, il importerait donc :

  1. de freiner dès à présent le recrutement des fonctionnaires, de façon à limiter l'inéluctable explosion des dépenses de personnel du budget général (700 milliards de rémunération d'actifs et de pensions retraites rien que pour 2000). Or, c'est exactement le contraire de ce que fait le gouvernement Jospin, qui vient d'annoncer 20.000 créations de postes en 2001.

  2. de dégager des excédents budgétaires de façon à provisionner les retraites, à l'image de ce qu'a fait l'administration Clinton aux Etats-Unis. Là encore, c'est exactement le contraire de ce que fait la majorité plurielle française, incapable de résorber les déficits en dépit de la reprise économique (déficit public de 209,5 milliards en 2000).

  3. d'inciter les actifs du privé ou du public à capitaliser de façon a préserver leur pouvoir d'achat futur, à l'image de ce que font les sociaux démocrates allemands. Cela impliquerait de faire la promotion des fonds de pensions existant dans le public (Préfon, etc.) et de les généraliser dans le privé. Or, le gouvernement Jospin fait, là encore systématiquement le contraire comme l'illustre l'abrogation de la loi Thomas ou le tout récent débat sur l'épargne salariale.

Force est malheureusement de constater que français – du public comme du privé – se préparent des lendemains qui déchantent.